- Webmaster SENSOPROJEKT
- 17 mars 2022
- Lieux Collection Lambert en Avignon
- Réalisateurs Yuki Okumura
- Pays de production Belgique
- Caractéristiques Anglais, Couleur
- Artistes Gordon Matta-Clark
Welcome Back : Gordon Matta-Clark, de Yuki Okumura, autoproduction, anglais, VOSTF, 48 min., Belgique, 2017 – Sous-titrage français produit par SensoProjekt.
« Welcome Back : Gordon Matta-Clark » est un film réalisé par l’artiste japonais Yuki Okumura, qui relève à la fois d’une enquête portant sur l’art et des musées, et d’une investigation autobiographique. Presque comme dans un thriller, l’artiste s’aventure dans un interrogatoire à l’issue duquel surgira l’intrigue d’une possible réincarnation. Ce film retrace et intègre la mémoire de l’artiste états-unien Gordon Matta-Clark (1943-1878) lors de sa rencontre avec Flor Bex qui était à l’époque, directeur de l’ICC – International Cultural Center – à Anvers (B) et qui avait à ce titre invité Matta-Clark en 1977 à réaliser une œuvre majeure dans cette ville. Il relate le voyage de l’artiste allant de Paris où il a une exposition à la Galerie Yvon Lambert, à Kassel puis à Anvers.
Ce documentaire d’un autre genre, raconte sur base de témoignage vivant, l’élaboration de « Office Baroque », l’œuvre urbaine « anarchitecturale » que Matta-Clark réalise en intervenant sur un ancien immeuble désaffecté à Anvers, dans le sillage de ce qu’il avait créé à Paris sur le site du futur Centre Pompidou (« Conical Intersect », 1975). Il conte la malencontreuse destruction de cette pièce peu de temps après la mort prématurée de l’artiste – d’un cancer fulgurant et ce, à peine deux ans après le suicide de son frère jumeau John Sebastian. C’est à lui qu’est dédié « Descending the Steps for Batan » où Matta-Clark creuse un trou profond dans le sol de la galerie Yvon Lambert en avril 1977 – et dont la précieuse Collection Lambert conserve les archives.
Ce film d’artiste réussit par un travail d’approche et de complicités nouées, de dialogues intimes autant qu’absurdes, à susciter une sorte de double réincarnation : celle de « Office Baroque » en MuHKA (Museum voor Hedendaagse Kunst van Antwerpen), musée d’art contemporain qui sortira de terre en 1982 à l’initiative de Flor Bex et de nombreux amis, comme un des effets de la démolition de l’œuvre urbaine « amonumentale ». Et celle de Gordon Matta-Clark en Yuki Okumura, sachant que l’artiste japonais perd également un frère qui s’est donné la mort. Doit-on conclure à une identification, un transfert, une projection ? L’énergie qui se déploie dans le film donne plutôt à penser au réveil par Yuki Okumura d’une âme ou d’un fantôme qui conduit à la survivance d’une ombre ou d’un esprit se dégageant de liens d’amitié et de fraternité comme d’occurrences quasi miraculeuses qui finissent par transcender la vie et la mort.
En présence de Yuki Okumura (1978), artiste japonais vivant entre Bruxelles, Maastricht et Tokyo, qui a étudié à la Tama Art University puis à la Tokyo National University of Fine Arts and Music. Très tôt, il s’intéresse à l’auto-portrait, questionne qui est l’auteur.e de l’œuvre, pas tant pour multiplier les images de lui-même (au contraire) ou décliner les citations (reconnues ou déniées) que pour « acter » le simple fait que l’on peut devenir quelqu’un d’autre. Au Musée d’art contemporain de Tokyo, est accrochée une œuvre emblématique de Okumura, intitulée « Anatomy Fiction » et qui propose à des enfants de 4 à 7 ans de dessiner leur propre anatomie – dont ils n’ont aucune connaissance – allant ainsi de l’invisible au visible réel ou fantasmé quant à soi. Okumura a été reçu comme « artiste en résidence » au Wiels (Bruxelles) en 2012-2013. Il est représenté par la galerie Misako & Rosen (Tokyo) – présente à la foire Art-O-Rama à Marseille en 2019. En associant les paroles aux actes, l’œuvre essentiellement performative et filmique d’Okumura explore la réalité paranormale entre un sujet et un autre, et les alternances que provoque la communication interpersonnelle.