Maurizio Cattelan est le provocateur le plus connu et le mieux aimé du monde artistique et qui, après plus de vingt ans de carrière, doit régulièrement ajuster sa posture pour continuer sa danse sur le fil. Difficile de pratiquer la subversion face à des grands collectionneurs prêts à payer des sommes élevées le droit d’applaudir à vos moindres facéties ou de moquer le marché de l’art quand celui-ci se félicite de votre conduite. En 2011, après l’érection de L.O.V.E., monument polémique à Milan (main de marbre aux doigts coupés à l’exception de l’index dressé), et une rétrospective marquante au Guggenheim Museum, l’artiste annonçait son retrait du monde artistique. Aujourd’hui, il a retrouvé sa place avec un petit geste (la banane vendue à la foire ArtBasel Miami en 2019) et, tout récemment, avec une monumentale commémoration du 11 septembre, pièce centrale d’une nouvelle exposition au Hangar Bicocca de Milan (jusqu’au 20 février 2022).

Pour faire le portrait d’un artiste showman qui paradoxalement s’exprime peu et fuit le public, la réalisatrice a conçu, avec sa complicité, un film original et drôle. Mêlant les témoignages et les visites d’exposition à un rythme trépidant, croisant le réel et la fiction dans des proportions difficiles à déterminer, il nous en apprend beaucoup en restant fidèle à l’esprit de ce joueur éternel (ou presque) qu’est Cattelan.

Première réalisation de Maura Axelrod, ce documentaire braque les projecteurs sur l’insaisissable Maurizio Cattelan, de sa jeunesse à sa rétrospective au musée Guggenheim en 2011. Qu’il ait réalisé des œuvres provocatrices telles que La Nona Ora, avec le pape Jean-Paul II frappé par une météorite, ou Now, son sosie en cire dans un cercueil ouvert (exposé dans la Chapelle des Petits Augustins, aux BA en 2004), ou qu’il ait fait exploser les ventes aux enchères, on le sait et on l’apprécie ou pas. Mais qu’il ait sans cesse su renouveler son projet artistique subversif, qu’il ait usé de la duperie d’un double dans ses interviews, qu’il ait fait croire à l’interruption de sa carrière d’artiste, ce qui a tout l’air du Fake News, voilà autant de supercheries ou de postures que met bout à bout ce film drôle, désopilant et soulevant sans détour la question : qui est l’artiste ?

La réalisatrice Maura Axelrod a travaillé comme scénariste et productrice pour ABC News à New York, puis pour APTV réalisant des reportages sur les guerres d’Irak et d’Afghanistan. Depuis six ans, elle se concentre, en production et en réalisation, au monde de l’art.